Le développement rapide des solutions robotisées de livraison du dernier kilomètre annoncent des changements de modèles. Où en sont les expérimentations ? Le robot apportera-t-il une solution durable pour la ville ? Comment évoluera la fonction du livreur ?

Le robot de livraison saura effectuer certaines tâches et réduire la pénibilité, mais il ne remplacera pas le livreur dans sa fonction de service au client.

Le mot robot, qui vient de la racine slave signifiant travail, est apparu pour la première fois en 1920 dans une pièce de théâtre tchèque. Il a pour signification un humain organique et artificiel, en quelque sorte un androïde, qui remplace le travail de l’homme.

Sortons de la science-fiction et analysons son application dans la livraison du dernier kilomètre. Depuis quelques années, des dizaines de modèles de robots de livraison, de différentes formes, sont apparus en test, en photo ou en vidéo sur les réseaux sociaux. Au-delà de l’effet d’annonce, plusieurs modèles semblent émerger.

Le robot suiveur est un véhicule autonome qui suit un livreur à pied. Il ne remplace pas le livreur, mais lui porte sa charge. Cette charge peut ainsi être plus importante. La pénibilité du travail est réduite. Le livreur peut aussi être plus productif en marchant plus vite, n’ayant pas à pousser un chariot ou porter des colis.

Autre modèle, celui du petit drone roulant autonome. Très adapté à une fragmentation des flux, il remplace le livreur qui devient le pilote d’une flotte de drones. Bien sûr, il n’ouvre pas la porte, n’appuie pas sur l’interphone et ne monte pas les 5 étages…

Mais ce n’est plus tout à fait du futur. La société Starship a déjà en service une flotte de 43 robots qui livrent des repas et des colis sur le campus universitaire George Mason, à côté de Washington. Nous sommes passés de l’expérimentation à la réalité.

Le dernier né de ces robots, encore en test, le Sameday Bot, présenté par Fedex, montre une évolution majeure : il monte les marches d’escalier.

Autre modèle très différent, celui du véhicule composé de plusieurs casiers. Le véhicule est plus grand et peut contenir de 4 à 30 cases, en quelques sorte des consignes. La start-up californienne Nuro, qui a imaginé un véhicule doté de 4 cases, vient tout juste de lever 940 millions $ pour développer ce véhicule.

Sur un modèle un peu différent, l’e-marchand chinois JD.com a mis en service une première flotte de 20 véhicules autonomes dotés de 22 casiers. L’internaute est prévenu par SMS de l’arrivée du véhicule et retire son colis dans le casier qui lui est affecté.

Ces modèles montrent à la fois la progression extrêmement rapide de la technologie, les montants d’investissements considérables en jeu, mais pose de nombreuses questions, qui sont pour certaines loin d’être résolues.

Tout d’abord, dans tous ces modèles, les derniers mètres sont effectués par le destinataire. Il y a donc une dégradation du service par rapport à la livraison à domicile. Il doit sortir de chez lui, descendre les étages, et retrouver le véhicule dans la rue.

Le second problème est la capacité. Un véhicule de livraison a une charge variable, mais souvent de 14 à 20 m3. Ces robots sont petits et la création de casiers diminue considérablement le nombre de colis transportés et le volume réel de chargement. Un véhicule traditionnel contient environ 100 à 120 colis. S’il faut 5 fois plus de véhicules pour effectuer la même tournée, il est probable que l’effet environnemental, notamment sur la congestion, sera négatif, sans même parler du modèle économique, encore inconnu.

Une autre question se pose : où et comment circuleront ces nouveaux véhicules ? Nous avons récemment vu avec l’arrivée des trottinettes et vélos en free floating les problèmes posés par une absence d’anticipation de gestion de l’espace public. Qu’en sera-t-il pour les robots ? Circuleront-ils sur le trottoir, sur les pistes ou bandes cyclables, sur la chaussée entre les voitures et autres autobus ou camions ? Autant de questions qui sont particulièrement complexes à résoudre sans une connaissance plus approfondie des modèles.

Le robot est-il en mesure de remplacer le service apporté par le livreur ?

La meilleure parade pour bien accompagner cette évolution technologique est encore de développer le service, plus que jamais réclamé par l’internaute dans la livraison du dernier kilomètre. L’homme a alors encore pour longtemps toute sa raison d’être dans l’acte de livraison du dernier kilomètre. La valeur ajoutée d’un livreur n’est pas de porter une charge ou de conduire un véhicule. Elle est de respecter un engagement vis-à-vis d’un client, de lui apporter le service attendu.