« La tournée de livraison, en optimisant les chargements et les trajets, permet de réduire le nombre de véhicules dans la ville et l’impact environnemental du dernier kilomètre ».

La période récente a vu émerger de nombreuses solutions de livraison à domicile, afin de répondre à la demande croissance des consommateurs. Confinés chez eux pendant longtemps, les consommateurs sont nombreux à avoir adopté des solutions de livraison à domicile. La période actuelle de post-confinement est d’abord celle d’une situation de prudence sanitaire.

La livraison à domicile est plébiscitée par les consommateurs

Certains consommateurs ont découvert, à l’occasion de la crise actuelle, la facilité de la livraison à domicile et souhaitent continuer à faire appel à ces services. Sans doute pour compenser les fermetures des magasins, l’e-commerce non alimentaire pratiquait, pendant le confinement, des livraisons à domicile « gratuites » dans 72% des cas début mars, et dans 69% des cas début avril. De plus, de nouveaux services de livraison à domicile ont émergé durant cette période, par exemple au départ des pharmacies. Les réglementations sur les horaires de livraison et en matière de bruit ont également été assouplies dans cette période exceptionnelle.[1]

Dans un autre registre, les commerçants, longtemps fermés, et les restaurateurs, n’ont pas eu d’autre choix que de mettre en place des solutions de livraison au départ de leur points de vente ou des drives.

Souvent mises en œuvre dans l’urgence de la crise, les solutions de livraison proposées ne sont pas toujours les plus pertinentes. Tous les moyens ont été utilisés afin de répondre à des demandes multiples et immédiates : des voitures individuelles, des coursiers, des scooters, des taxis… Les transporteurs professionnels ont répondu présents en adaptant les offres de transport en fonction d’une demande de livraison à domicile en forte progression, alors que d’autres secteurs, comme la livraison des commerces non alimentaires, étaient totalement à l’arrêt.

Selon le baromètre Foxintelligence[2], les commandes e-commerce de produits alimentaires, en drive et livraison à domicile, ont atteint un niveau 40% supérieur par rapport à la situation avant confinement, entre le 23 mars et le 13 avril, puis de 30% supérieur jusqu’au 27 avril. Les livraisons à domicile se sont avérées plus fréquentes que le drive sur ces périodes.

Les modèles de livraison sont-ils tous pertinents ?

Au-delà de la situation d’urgence à laquelle tous ont dû faire face, posons-nous la question de la pertinence des modèles utilisés.

Le modèle le moins optimisé est toujours celui de la trace directe, une livraison unique d’un point de départ (par exemple un commerce) à un point de destination (par exemple un particulier). En effet, pour effectuer cette opération, le commerçant, ou le transporteur, met en place un véhicule dédié, avec une seule livraison. Il s’agit souvent de scooters ou de véhicules mal optimisés. Finalement, ce sont de nombreux kilomètres effectués pour peu de livraisons. L’encombrement de l’espace public est alors un sujet même si la congestion urbaine reste actuellement faible par rapport à ce qu’elle était avant la crise sanitaire.

Nous devons donc revenir à des modèles de livraisons plus optimisés. Il s’agit nécessairement de livraison en tournées, comme cela a toujours existé dans la messagerie. Le véhicule qui part d’un entrepôt, d’un commerce, ou d’une rue commerçante, collecte différentes commandes vers un secteur de livraison le plus restreint possible. Il s’agit d’un véhicule utilitaire professionnel, mieux rempli. Le transporteur, qui peut organiser sa tournée en fonction des contraintes de livraison des clients, effectue alors une tournée dans une plage horaire précise. Il peut utiliser un logiciel d’optimisation des trajets pour l’aider à organiser son activité en tenant compte des différents paramètres internes ou externes.

Revenir à la tournée de livraison est une nécessité afin de ne pas faire de ce service indispensable un non-sens économique et environnemental. La tournée de livraison est la solution la plus simple afin de maîtriser le nombre de véhicules de livraison dans la ville et en réduire l’impact environnemental.

En quelque sorte, la tournée de livraison est comme un autobus alors que la trace directe est un taxi. Si le taxi est indispensable dans certains cas, il ne doit correspondre qu’à une petite partie des trajets au risque de transformer la mobilité.

Le taxi ou le trajet en trace directe représentent un coût élevé. Si le consommateur recherche dans la livraison à domicile un service qui correspond à ses attentes et lui permet de limiter ses déplacements, il n’est probablement pas prêt à payer un prix élevé d’un transport dédié. En développant de nombreuses livraisons dédiées, nous créons des modèles économiques qui ne correspondent pas aux attentes. Ces modèles sont alors fragilisés et ne permettent pas de rémunérer normalement les livreurs, qui effectuent ce travail souvent difficile et pas toujours attractif.

La crise actuelle, qui a placé la logistique et la livraison des particuliers en première ligne, ne doit pas faire oublier l’organisation de ces services afin qu’ils soient intégrés dans l’espace urbain et optimisés. Le modèle social qui encadre la livraison professionnelle est aussi le garant de la qualité du service, attendu par le destinataire. Le transport professionnel, souvent fondé sur l’organisation de tournées de livraison, apporte la bonne solution à ce besoin de service et de maîtrise de l’impact environnemental. Les transporteurs sont d’ailleurs les premiers à faire des efforts vers des flottes de livraison plus vertes.

[1] Source : Baromètre de la logistique urbaine en confinement #3 – Chaire Logistics City

[2] Baromètre #4, Baromètre #5 et Baromètre #6, Baromètre #7